Favoriser la créativité des territoires demande une forme de créativité dans les politiques. La littérature récente en économie et management de la créativité éclaire ce débat, et la recommandation européenne de "smart specialization strategy" (S3) indique une piste intéressante.
La notion interdisciplinaire de créativité a significativement modifié la vision que les économistes (et chercheurs en sciences sociales) ont du processus d'innovation. Elle permet entre autres d'éviter de trop se focaliser sur la seule dimension de la connaissance formelle (R&D, éducation, TIC, etc.) et de souligner le rôle des communautés de connaissance dans la créativité collective qui se situe en amont ou en appui de l'innovation. Ce changement de perspective est aussi paradoxalement un retour aux sources de la pensée sur l'innovation : rôle de l'entrepreneur chez Schumpeter; notion de découverte entrepreneuriale chez Hayek. En effet, au moins autant qu'un effet d'accroissement des connaissances, l'innovation est le résultat de la volonté des individus et des collectifs.
Qu'en est-il en matière de politiques territoriales? Y a-t-il des recettes pour rendre un territoire plus créatif à l'instar des propositions managériales sur l'entreprise créative? Les politiques d'innovation peuvent-elles s'inspirer de ces réflexions? Nous pensons que l'idée de "smart specialization strategy" (S3) lancée par l'UE à l'occasion de H2020, qui a été inspirée par des spécialistes de l'innovation comme Dominique Foray, va dans ce sens en suggérant une démarche bottom up fondée sur la révélation de projets territoriaux plutôt qu'un choix technocratique sur la base de l'existant.